Mémosciences

 

Des miroirs ardents aux fours solaires

Mercredi 24 avril 2013, 14h (Mons, Grands Amphithéâtres)

Entre recherches académiques et divertissement princier, les miroirs ardents : objets de science et de curiosité

Dr Christine Lehman (Université de Paris Ouest Nanterre, F)

Sujet de réflexions mathématiques, instrument de guerre et objet de culte dès l’antiquité, les miroirs ardents ont toujours exercé une réelle fascination car ils permettent à l’homme d’utiliser le feu solaire. Avec les progrès techniques les miroirs et les verres brûlants changent de taille et de statut. Au XVIIe siècle les miroirs concaves, manifestation de la grandeur royale, magnifiquement ornés et conçus pour le divertissement du Roi et de sa Cour, sont principalement des objets de curiosité. Puis au XVIIIe siècle, la lentille de Tschirnhaus, confiée aux académiciens, évolue en objet de science. Au début du siècle cette lentille permet une première approche de la nature des métaux qui sera reprise dans les années 1770 pour se transformer en une grande investigation du règne minéral, en particulier du diamant, sous la direction des académiciens Cadet de Gassicourt, Brisson, Macquer et Lavoisier.
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Agrégée de sciences physiques, Christine Lehman a effectué une carrière de professeur de physique et de chimie dans le secondaire. En 2006 elle a soutenu, sous la direction de Bernadette Bensaude-Vincent à l'université Paris X, une thèse en histoire des sciences sur le médecin chimiste Gabriel-François Venel (1723-1775) collaborateur de l'Encyclopédie. Chercheur associé au Centre d’histoire et de philosophie des sciences de Paris-Ouest Nanterre (IREPh), elle poursuit ses recherches sur la chimie du siècle des Lumières en particulier sur Pierre-Joseph Macquer. Son projet actuel concerne les multiples facettes – technique, chimique, philosophique et sociale – des miroirs ardents.

Les fours solaires d'Odeillo dans la guerre froide

Prof. Pierre Teissier (Université de Nantes, F)

Dans l'immédiat après deuxième guerre mondiale, une poignée de chimistes du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) installèrent, avec le soutien de l'armée française, des fours solaires dans la citadelle Vauban d'Odeillo dans les Pyrénées orientales. La concentration des rayons lumineux, qui permettait d'atteindre des températures de plusieurs milliers de degrés, fournissait un instrument d'étude des matériaux réfractaires dans des conditions extrêmes de température et de pression. Le Laboratoire de l'énergie solaire devint un centre d'essai internationalement reconnu, notamment après la construction du plus gros prototype de four solaire au monde dans les années 1960. Des deux côtés du rideau de fer, savants, experts militaires, administrateurs et industriels venaient visiter Odeillo et procédaient à des caractérisations de matériaux stratégiques. Dans le même temps, le Laboratoire promouvait "le soleil au service de l'humanité" par un programme de domotique solaire.  L'enchevêtrement des deux objectifs d'investigation au sein de la même institution fait d'Odeillo une énigme pour l'historien à la croisée du bricolage de paillasse et de la big science, de réalisations guerrières et pacifiques, d'espoirs économiques et d'utopies écologiques, de compétition idéologique et de coopérations humanistes. Je m'efforcerai d'analyser comment ces multiples contradictions de la guerre froide, en se concentrant toutes sur une pittoresque vallée ensoleillée, permirent le développement d'un projet solaire innovant et original.
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Diplômé de l’Ecole supérieure de physique et de chimie industrielles de la ville de Paris, Pierre Teissier s’est ensuite orienté vers l’histoire des sciences en décrochant un doctorat en Epistémologie, histoire des sciences et des techniques de l’Université Paris Ouest Nanterre sous la direction de Bernadette Bensaude-Vincent. D’abord centrées sur l’histoire de la chimie du solide en France depuis 1945, ses recherches se sont élargies à l’histoire de la chimie du solide et des matériaux dans une perspective comparative, incluant le Royaume-Uni et les Etats-Unis, ainsi qu’à l’implémentation des voitures électriques en Europe. Ses séjours postdoctoraux l’ont mené à Oxford, Philadelphie et Berlin, et il est actuellement maître de conférences de l’Université de Nantes, rattaché au Centre F. Viète , où il est responsable du thème « Histoire des matériaux et de l’énergie au XXème siècle ».
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